samedi, 19 mai 2007

Célébration


"
Connaissant l'île, tu me connaîtras aussi.
Dans un même souffle on nomme nos deux noms,
Et chaque pierre ici respire pour les crier.
Je suis son maître souverain, et je suis son esclave,
A elle enchaîné par l'indéfectible
Chaîne du flot salé qui nous cerne de bleu,
Moi, Philoctète, et Lemnos, mon île." *

Le ton est donné. Philoctète, en otage, blessé, pèse ses mots.
On l'écoute. On le suit des yeux dans sa démarche chancelante, sur le sable brûlant.
On est transpercé par son regard d'acier, l'émotion gagne quand il marmonne, abandonné.

Terre aride, silence de mort, le spectateur retient son souffle, tournant la tête pour saisir les perspectives, même s'il est, lui aussi, confiné sur l'île.

Trois perspectives, trois représentations, trois comédiens qui excellent. Le spectacle à portée de mains, je considère cela comme un luxe, une célébration d'avoir l'occasion de revoir ce spectacle. Le nom de "White box", salle dans laquelle se joue la pièce, n'évoquait pour moi "rien du tout" ! Désormais, les pas de Jacques Probst, la voix de Valentin Rossier et les regards de David Casada y seront liés, indéfectiblement.

*
Philoctète de Heiner Müller, traduction de F. Rey, mise en scène de Bernard Meister